La politique migratoire doit changer de cap

Caritas International Belgique La politique migratoire doit changer de cap

Nous avons besoin de voies sûres comme la réinstallation, avec des programmes comme le parrainage communautaire.. © Isabel Corthier / Caritas International

Nous avons besoin de voies sûres comme la réinstallation, avec des programmes comme le parrainage communautaire.. © Isabel Corthier / Caritas International

18/12/2023

En cette journée internationale des migrant-e-s, Caritas Europa appelle les dirigeants et dirigeantes européen-ne-s à soutenir des politiques migratoires basées sur les droits humains, au lieu d’entretenir l’illusion qu’empêcher la mobilité humaine est possible et souhaitable.

En 2023, la Journée internationale des migrant-e-s coïncide avec finalisation d’une réforme majeure de la politique européenne d’asile. Nous craignons que le nouveau Pacte européen sur la migration et l’asile n’érode l’accès à la protection internationale en Europe. Le nouveau mécanisme de solidarité flexible ne compensera pas la responsabilité accrue qui incombe aux pays de l’UE déjà mis à rude épreuve à la frontière extérieure de l’Union. La crainte que ces mêmes pays recourent à la détention à grande échelle et pratiquent des conditions d’accueil inhumaines est bien réelle, augmentant ainsi la souffrance des personnes. En outre, le nouveau mécanisme de screening risque d’aggraver et de légitimer des pratiques de profilage racial discriminatoire. Le Pacte perpétue la pratique problématique consistant à transférer vers des pays non européens la responsabilité de l’asile incombant aux pays européens. Il se concentre principalement sur la « réduction des flux entrants » et sur « l’accélération des retours », exposant les migrants et migrantes à des violations généralisées de leurs droits.

L’Union européenne doit changer de cap pour sauver des vies et garantir la démocratie. Nous ne voulons pas d’une Europe qui répand la peur des migrant-e-s. Au contraire, nous avons besoin d’une Europe qui continue à défendre les droits humains et à accueillir celles et ceux qui ont besoin de protection. Cela implique des politiques d’asile plus justes ainsi que des voies d’entrée sûres comme la réinstallation, les visas humanitaires et le regroupement familial. Sans changements, des personnes continueront à mourir en mer.

Une approche différente

Chez Caritas, nous croyons en une approche différente. Là où on observe aujourd’hui la violence et les refoulements, nous voulons voir des structures d’accueil humaines pour les personnes arrivant en Europe. Nous faisons le choix d’une Europe accueillante qui rassemble les gens et promeut la cohésion sociale et l’inclusion, plutôt que de polariser la société. Nous choisissons la solidarité plutôt que le rejet et les murs.

Première étape : faciliter l’immigration régulière vers l’Europe. Malgré les efforts récents des institutions européennes pour simplifier la migration de main-d’œuvre, rejoindre l’Europe en toute sécurité et légalité pour y travailler, étudier ou retrouver des membres de sa famille reste terriblement compliqué. Cela pousse les migrant-e-s à entreprendre des voyages dangereux, alors même que la plupart des pays européens sont confrontés à de pénuries croissantes de main-d’œuvre. Pour celles et ceux qui finissent par atteindre l’Europe, travail au noir et exploitation sont souvent au rendez-vous – en témoignent par exemple les abus et les conditions de travail précaires dans les secteurs de l’agriculture et des soins aux personnes.

Nous appelons les gouvernements européens à étendre leurs politiques en faveur de la migration de la main-d’œuvre à tous les niveaux de qualification tout en plaçant les droits et la dignité des travailleurs et travailleuses au centre de leurs préoccupations. Les législateurs européens seront bientôt amenés à finaliser la réforme de la directive sur le permis unique : à cette occasion, nous attendons qu’ils et elles facilitent l’accès à des permis de travail et de séjour sûrs, garantissent un meilleur traitement des travailleurs et travailleuses migrant-e-s et brisent la chaîne de dépendance à l’égard de leurs employeurs. En parallèle, ils et elles doivent poursuivre leurs efforts pour faciliter l’accès à un permis de séjour de longue durée dans l’UE, de manière à améliorer l’inclusion des migrant-e-s et à renforcer leurs droits.

Garantir la participation durable des personnes migrantes à la société et renforcer la cohésion sociale passe également par des politiques d’inclusion sérieuses et solidement financées : cours de langue, logement décent, accès à l’emploi grâce à la reconnaissance des diplômes et des compétences…

Enfin, nous devons élargir considérablement les partenariats et les instruments qui facilitent la mobilité des pays non membres de l’UE vers l’UE. Actuellement, les discussions en ce sens sont trop souvent liées aux négociations avec les pays d’origine et de transit pour lutter contre l’immigration irrégulière. Les partenariats pour la mobilité doivent être transparents, offrir des conditions de travail dignes et apporter une plus-value aussi bien aux pays d’origine qu’aux pays d’arrivée, en empêchant par exemple la fuite des cerveaux.

Investir dans une politique de migration et d'inclusion humaine

À l’approche des élections régionales, fédérales et européennes, nous avons besoin de politiques qui renforcent les valeurs européennes et la démocratie, tant en Belgique que dans le reste de l’Union européenne. Pour le bien de tous et toutes. Il est plus facile de semer la peur que de lutter contre les inégalités et la pauvreté croissantes. Mais la peur ne peut en aucun cas nous détourner de notre priorité : investir dans des politiques d’immigration et d’inclusion humaines, qui favorisent la participation à la société et la cohésion sociale. Il s’agit des migrant-e-s. Il s’agit de nous tous et toutes. C’est une question de choix et de vision : dans quel avenir voulons-nous vivre ?

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